
Location d’actions dans une SAS : un levier financier innovant… sous haute vigilance
-La location d’actions dans une société par actions simplifiée (SAS) revient en force comme outil d’optimisation financière, de gestion patrimoniale ou de préparation d’une transmission.
L’un des principaux attraits de ce mécanisme réside dans la souplesse du financement qu’il autorise. Le locataire d’actions, assimilé temporairement à un associé, peut verser des fonds en compte courant, lesquels sont remboursables à terme, sans création de capital et sans dilution de l’actionnariat. C’est donc une alternative ou un complément au financement bancaire, au capital-risque ou à l’augmentation de capital.
De plus, ce mécanisme peut faciliter l’entrée progressive d’un futur associé, dans le cadre d’une transmission d’entreprise ou d’une cession différée, tout en testant son implication.
Mais derrière cette opération séduisante – permettant à un tiers de devenir temporairement associé, d’alimenter un compte courant d’associé et de percevoir dividendes et droits de vote – se cache un casse-tête juridique et fiscal.
La location d’actions dans une société par actions simplifiée (SAS) constitue une pratique juridique encore marginale mais en expansion, notamment dans les contextes de financement participatif, de préparation à la transmission d’entreprise ou de gestion patrimoniale dynamique. Elle permet à un tiers d’obtenir, à titre temporaire, les droits attachés à des actions (vote, dividendes) sans en devenir propriétaire, tout en alimentant un compte courant d’associé au bénéfice de la société.
La possibilité de donner à bail des actions est prévue par l’article L.239-1 du Code de commerce, à la condition que les statuts de la SAS l’autorisent expressément. Seules les actions nominatives non négociables peuvent faire l’objet d’une location, et uniquement au profit d’une personne physique. Sont exclus les titres inscrits dans des systèmes de conservation collective ou bénéficiant d’avantages fiscaux spécifiques.
Le principal écueil réside dans le risque de requalification fiscale. En effet, l’administration peut considérer les avances en compte courant réalisées par un locataire d’actions comme des revenus distribués déguisés, notamment si le bénéficiaire exerce une influence ou s’il a eu la disposition effective de ces fonds. La jurisprudence impose une traçabilité rigoureuse et la démonstration de l’absence de mise à disposition personnelle.
Par ailleurs, des dividendes perçus par un locataire d’actions peuvent eux aussi faire l’objet d’un redressement, s’ils sont assimilés à des produits de placement déguisés ou à des avantages injustifiés.
La jurisprudence administrative récente rappelle la vigilance accrue de l’administration fiscale quant aux sommes figurant au crédit d’un compte courant d’associé. Ainsi, le Tribunal administratif de Pau (1ère chambre, 2 mai 2023, n° 2101282) a jugé que ces sommes sont présumées constituer des revenus de capitaux mobiliers imposables, sauf si l’associé rapporte la preuve de l’absence de mise à disposition effective ou démontre qu’il ne s’agit pas d’un revenu. Cette décision souligne l’importance d’une traçabilité rigoureuse et d’une documentation probante pour éviter la requalification.
Dans une autre affaire, le Tribunal administratif de Nice (1ère chambre, 30 janvier 2025, n° 2303490) a confirmé la position de l’administration qui avait requalifié l’usage d’un véhicule de société à des fins privées comme revenu distribué au sens du c) de l’article 111 du Code général des impôts. Le requérant, n’ayant pas contesté l’usage privé du véhicule, a vu l’avantage considéré comme une distribution imposable. Cette affaire illustre l’attention portée par les services fiscaux aux avantages en nature non déclarés, y compris lorsqu’ils résultent de montages indirects ou atypiques.
Ces deux décisions, bien que rendues dans des contextes distincts, traduisent une même logique : l’administration examine avec rigueur toute opération financière ou patrimoniale entre une société et ses associés, y compris les locataires d’actions, pour détecter d’éventuelles distributions déguisées. Elles appellent à une structuration juridique et comptable irréprochable des opérations impliquant des comptes courants d’associé ou l’accès aux droits sociaux sans détention en pleine propriété.
Le respect de ce cadre juridique est un préalable absolu : une location d’actions hors des conditions légales serait frappée de nullité et pourrait entraîner ainsi des sanctions civiles ou fiscales.
Une mauvaise structuration peut faire basculer l’opération dans l’irrégularité, voire déclencher une requalification fiscale redoutable.
La location d’actions dans une SAS, combinée à l’alimentation d’un compte courant d’associé, est un outil utile mais délicat, qui exige un montage sur mesure. Il s’agit d’une mécanique hybride entre financement, gouvernance et droit des sociétés, qui doit être traitée avec la même rigueur qu’une opération de haut de bilan.
Le cabinet TURLAN AVOCATS vous accompagne dans la rédaction des statuts, la structuration du contrat de location et la gestion des risques fiscaux liés à ce type d’opération, pour en tirer tous les avantages… sans en subir les conséquences.
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